lundi 31 août 2009

Marcel TEYSSEYRE

Celà va faire un mois que Marcel nous a quitté.
Il m'avait chargé d'introduire son premier roman publié aux éditions BIBLIOPHANE pour une présentation publique de "ALLEMAGNE ENTRE CHIEN ET LOUP".
Je me permets de publier cette introduction en hommage à la mémoire de mon ami et de sa famille (tout particulièrement sa femme Françoise).
  • "Courant 2008, la SNCF organisait à grand coup de publicité la promotion de voyages en Allemagne suite à l’ouverture de la ligne TGV – Est (tout un symbole !).
    Pour 29 Euros nous annonçait on, nous avions l’occasion « d’aller voir ce qu’il y a derrière nos idées reçues ».

    Eh bien pour 19 euros, soit 10 euros de moins, vous avez désormais l’occasion de voyager dans l’espace germanique, mais également dans le temps, grâce aux éditions Bibliophane de Daniel RADFORD qui ont publié le premier roman de Marcel TEYSSEYRE : « Allemagne, entre chien et loup ».

    Avant de présenter ce roman, il convient de s’attarder un petit peu sur les circonstances de sa publication.
    En effet il n’est pas anodin de remarquer que l’éditeur est non seulement de confession juive mais également rabbin : c’est dire s’il trouvait, par delà les qualités réelles d’écrivain de Marcel, que le sujet était bien traité.

    D’ailleurs nous retrouvons dans la construction de l’intrigue cet esprit « talmudique » : point de révélations à grands fracas sur l’histoire, la culture ou la société allemande ; encore moins de grands poncifs ; mais à travers des anecdotes, des descriptions finement observées … un réseau d’éléments fait apparaître en négatif la réalité d’une Allemagne en mouvement, sous la plume pudique et mesurée, mais néanmoins pertinente d’un grand témoin.

    Voyage dans l’espace, la géographie allemande nous dit on n’avait rien pour plaire à l’état de nature mais des générations d’êtres humains l’ont façonné pour la rendre belle ; à l’inverse de sa cousine française qui, ayant tout pour plaire, fait l’objet d’aménagements douteux.
    Je ne sais si cela est vrai, bien que connaissant les deux pays, mais ce qui est certain c’est que le territoire allemand se révèle à vous en lisant les pages que Marcel y consacre.

    Soin de la description apportée au moindre détail :

    Tableau d’un panorama dressé à grands traits :

    Plus particulièrement, l’attachement humain à une région particulière de l’Allemagne, la Rhénanie : ses petites villes, les bords du fleuve bordés de parcs abrités d’arbres, les aulnes …

    Tous les symboles de la culture allemande classique et romantique viennent s’y condenser, avec en contrepoint les mots de Paul CELAN : « Der Tot ist ein Meister von Deutschland » qui éclairent d’un rayon noir tout ce passé glorieux et l’espoir si ce n’est d’une normalisation, d’une continuation de l’histoire de ce pays pour le meilleur qu’elle a donné au monde et désormais en lutte toujours contre ses fantômes : les disparus, les sans noms, les assassinés – les assassins, les détruits – les destructeurs.

    C’est sur les bords de ce fleuve – liant aussi bien que frontière – que le narrateur du roman retrouve le pays où il a grandi en « occupant », puis étudié et travaillé, après la guerre.

    C’est le pays de son amour discret qui comme un fil d’Ariane le guide toute une vie dans les labyrinthes de l’histoire quand avant le dénouement de l’intrigue tout semble se dérober sous lui.

    Témoignages, souvenirs, flash back, mise en abîme de l’auteur narrateur … tous les procédés sont requis pour rendre compte d’une complexité qui ne peut se résumer à un passé.

    Sous l’œil du Directeur en Ressources Humaines et de sa jeunesse, se découvre toute l’Allemagne post nazisme dont le point d’orgue sera la réunification en 1989 qui n’ira pas sans poser de problèmes.

    Toutefois cette Allemagne de l’Est se découvre elle aussi loin des clichés.
    Nous la redécouvrons dans son histoire : la lointaine et la plus récente ; son patrimoine et ce qu’il en reste après les bombardements incendiaires au phosphore des alliés.
  • Nous la redécouvrons économiquement en difficultés certes, mais pleine de ressources, innovante et adaptée aux défis de demain pour peu qu’on lui en donne les moyens.

    Ainsi découvrons nous une nation « dynamique », qui ne tourne plus le dos à la modernité, à travers les regards croisés du narrateur et de l’enfant qu’il était ; mais aussi ceux du narrateur et de son fils.

    Témoignage qui ne laisse pas indemne, tant l’implication de cet homme dans ce pays sera entière, au plus profond de ses secrets cachés.

    Marcel vit à présent en Gironde, près de ses enfants et petits enfants, où il continue sa carrière littéraire : 2 livres de lui sont à paraître, l’un sur les « cagots », l’autre sur « l’esclavagisme » et un en finition d’écriture …

    C’est dire si l’œuvre de Marcel TEYSSEYRE s’attache aux non dits de l’histoire qu’il aide à accoucher pour qu’ils ne viennent plus hantés nos enfants."