Une connaissance de mes amis me disait un jour :
« Moi je fais de la finance ... les études c'est pas mon truc : ça ne sert à rien! »
Alors étudiant en économie financière, ses propos m'interpelaient.
Assis à une terrasse, tout en l'écoutant, je faisais des bulles dans ma limonade.
« Et, lui dis je, c'est quoi la finance pour toi? »
« Eh bien! Figure toi qu'avec 100 Francs j'ai pu acheter pour 500 F d'actions et je les ai revendues à la fin du mois pour 1000 F, ce qui fait ... enfin j'ai gagné 900 F en un mois! »
Pressentant qu'il attendait quelques éclaircissements scientifiques sur cette multiplication de petits pains je lui répondis :
« Bien, en langage financier tu es donc intervenu sur le MARCHE SECONDAIRE de la bourse. Tu as effectué une OPERATION D'ACHAT VENTE (sans doute en fixant un seuil au prix d'achat ou au moins de revente) le tout en utilisant ton POUVOIR DE LEVIER. Ce qui fait que dans le contexte haussier actuel du cours des actions le RENDEMENT de ton opération est de 1000%, dont il faut que tu déduises les frais prélevés par ta banque. »
« Ouais, tout à fait! Eh bien avec ces 1000 F j'ai racheté des actions et j'ai gagné 10000 F. Et avec ces 10000 F je vais ... »
« OK! OK! OK! Je crois que j'ai compris! »
Moi qui me spécialisait dans la finance je “coûtais” 1000 F tous les mois, qui s'accumulaient pour grossir la dette que je devais rembourser à la fin de mes études à la banque qui m'avait fait crédit; pendant que ce jeune capitaliste insouciant se gonflait des couilles en or en jouant à la loterie et réinvestissant capital et plus value tous les mois.
Dans ce contexte je me demandais si je ne devais pas aller plus loin dans la bêtise en plaçant les mensualités de mon emprunt, négocié à 6%, sur le marché des actions qui me rapporterait du 1000%. Et pourquoi pas les placer sur les produits dérivés : le marché obligataire se portait bien aussi et les junk bonds rapportaient énormément! Les produits à terme! Les options! Ou ...
Certes il ne fallait pas miser sur leur valeur finale, mais simplement spéculer sur leur cours dont la variation positive phénoménale laissait peu de doutes sur la stratégie à adopter : qu'importait le placement à long terme, la recherche de dividendes ou la distribution de coupons, il ne fallait pas chercher à bénéficier de la richesse créée mais jouer sur la valeur future du produit financier c'est à dire in fine de l'organisme émetteur de ce même produit.
C'était au milieu des années 1990, les rentiers se portaient bien et le diagnostic de cher John qui préconisait de les euthanasier était loin d'être partagé par les doctes économistes, dont le nombre croissait encore plus vite que le cour du CAC 40 en cette période d'euphorie financière.
Ils renouvelaient à tour de bras et avec force figure de style les commentaires sur la situation boursière.
Cynisme ou ferme croyance dans les vertus d'une croissance infinie enfin trouvée, toujours est il qu'ils devaient disparaître lors du krach : car une bulle, sachez le, ne se dégonfle pas, elle explose!
L'été précédent ce sinistre automne (les krachs ont “toujours” lieu en automne) j'allais arrondir mes fins de mois en travaillant.
Je trouvais une banque qui voulait bien de moi pour tenir le guichet.
Là aussi la fièvre boursicoteuse faisait des ravages : l'on y vendait des actions comme on aurait vendu des petits pains dans une boulangerie.
A la mère de famille venant retirer des extraits de compte, au petit vieux venant déposer sa pension, jusqu'au RMIste venant négocier son emprunt! L'on faisait goûter des échantillons financiers qui n'étaient même plus négociés dans le secret bancaire de bureaux bien isolés, mais directement au guichet :
« Au fait nous venons d'avoir un arrivage tout frais d'actions X, êtes vous intéressé? Elles sont seulement à 10 F la pièce ... Ou bien préférez vous des actions Y? »
Ecoeuré je pris mon solde de tout compte et allait chercher un travail plus manuel ... on voulait m'y rémunérer en actions!
J'étais cerné.
Enfin la tornade passa, ravageant le château de cartes et occasionnant également quelques dégâts colatéraux, mais le ciel comme rincé était redevenu bleu.
Une jeune fille faisait des bulles de savon à l'aide d'une paille échancrée, j'étais assis à une terrasse observant leur vol avant leur explosion fatale, quand mon ami surgit de nulle part.
« Eh ben, dit il, j'en ai chié des bulles avec la bourse! »
« Que vas tu faire à présent, lui demandais je? »
« Oh! Moi je vais faire entrepreneur ... les études c'est pas mon truc : ça sert à rien! »
« Moi je fais de la finance ... les études c'est pas mon truc : ça ne sert à rien! »
Alors étudiant en économie financière, ses propos m'interpelaient.
Assis à une terrasse, tout en l'écoutant, je faisais des bulles dans ma limonade.
« Et, lui dis je, c'est quoi la finance pour toi? »
« Eh bien! Figure toi qu'avec 100 Francs j'ai pu acheter pour 500 F d'actions et je les ai revendues à la fin du mois pour 1000 F, ce qui fait ... enfin j'ai gagné 900 F en un mois! »
Pressentant qu'il attendait quelques éclaircissements scientifiques sur cette multiplication de petits pains je lui répondis :
« Bien, en langage financier tu es donc intervenu sur le MARCHE SECONDAIRE de la bourse. Tu as effectué une OPERATION D'ACHAT VENTE (sans doute en fixant un seuil au prix d'achat ou au moins de revente) le tout en utilisant ton POUVOIR DE LEVIER. Ce qui fait que dans le contexte haussier actuel du cours des actions le RENDEMENT de ton opération est de 1000%, dont il faut que tu déduises les frais prélevés par ta banque. »
« Ouais, tout à fait! Eh bien avec ces 1000 F j'ai racheté des actions et j'ai gagné 10000 F. Et avec ces 10000 F je vais ... »
« OK! OK! OK! Je crois que j'ai compris! »
Moi qui me spécialisait dans la finance je “coûtais” 1000 F tous les mois, qui s'accumulaient pour grossir la dette que je devais rembourser à la fin de mes études à la banque qui m'avait fait crédit; pendant que ce jeune capitaliste insouciant se gonflait des couilles en or en jouant à la loterie et réinvestissant capital et plus value tous les mois.
Dans ce contexte je me demandais si je ne devais pas aller plus loin dans la bêtise en plaçant les mensualités de mon emprunt, négocié à 6%, sur le marché des actions qui me rapporterait du 1000%. Et pourquoi pas les placer sur les produits dérivés : le marché obligataire se portait bien aussi et les junk bonds rapportaient énormément! Les produits à terme! Les options! Ou ...
Certes il ne fallait pas miser sur leur valeur finale, mais simplement spéculer sur leur cours dont la variation positive phénoménale laissait peu de doutes sur la stratégie à adopter : qu'importait le placement à long terme, la recherche de dividendes ou la distribution de coupons, il ne fallait pas chercher à bénéficier de la richesse créée mais jouer sur la valeur future du produit financier c'est à dire in fine de l'organisme émetteur de ce même produit.
C'était au milieu des années 1990, les rentiers se portaient bien et le diagnostic de cher John qui préconisait de les euthanasier était loin d'être partagé par les doctes économistes, dont le nombre croissait encore plus vite que le cour du CAC 40 en cette période d'euphorie financière.
Ils renouvelaient à tour de bras et avec force figure de style les commentaires sur la situation boursière.
Cynisme ou ferme croyance dans les vertus d'une croissance infinie enfin trouvée, toujours est il qu'ils devaient disparaître lors du krach : car une bulle, sachez le, ne se dégonfle pas, elle explose!
L'été précédent ce sinistre automne (les krachs ont “toujours” lieu en automne) j'allais arrondir mes fins de mois en travaillant.
Je trouvais une banque qui voulait bien de moi pour tenir le guichet.
Là aussi la fièvre boursicoteuse faisait des ravages : l'on y vendait des actions comme on aurait vendu des petits pains dans une boulangerie.
A la mère de famille venant retirer des extraits de compte, au petit vieux venant déposer sa pension, jusqu'au RMIste venant négocier son emprunt! L'on faisait goûter des échantillons financiers qui n'étaient même plus négociés dans le secret bancaire de bureaux bien isolés, mais directement au guichet :
« Au fait nous venons d'avoir un arrivage tout frais d'actions X, êtes vous intéressé? Elles sont seulement à 10 F la pièce ... Ou bien préférez vous des actions Y? »
Ecoeuré je pris mon solde de tout compte et allait chercher un travail plus manuel ... on voulait m'y rémunérer en actions!
J'étais cerné.
Enfin la tornade passa, ravageant le château de cartes et occasionnant également quelques dégâts colatéraux, mais le ciel comme rincé était redevenu bleu.
Une jeune fille faisait des bulles de savon à l'aide d'une paille échancrée, j'étais assis à une terrasse observant leur vol avant leur explosion fatale, quand mon ami surgit de nulle part.
« Eh ben, dit il, j'en ai chié des bulles avec la bourse! »
« Que vas tu faire à présent, lui demandais je? »
« Oh! Moi je vais faire entrepreneur ... les études c'est pas mon truc : ça sert à rien! »
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