>> "Sigfried et le Limousin" de J. GIRAUDOUX ? Une histoire de déchirement franco-allemand vécu en l'être même d'un individu, mais aussi entre deux amis.
>> Et moi, élevé par une nourrice alsacienne germanophone jusqu'à l'âge de 3 ans, c'est à dire l'âge des premiers souvenirs. Autant dire élevé à parité entre l'allemand et le français avant que mes souvenirs ne se forment. Mais suffisamment imprégné de cette autre langue, que je ne comprendrai désormais plus dans la bouche de mes propres grands parents, avant un timide réveil au cours tardif de mon adolescence. Les alsaciens germanophones pour qui je resterai toujours un "chien savant" francophone ; j'aurai toujours trois ans pour mes grands parents paternels !
Si pour la génération de mes parents il était encore aisé de se rebeller contre le pouvoir qui leur avait explicitement interdit leur langue maternelle, retranché cette extension de l'organe qu'est "une voix qui dit sa langue", pour nous que reste-t-il à combattre ?
Nos parents, déjà artificialisés par le français, pouvaient nous transmettre cette langue, mais en avaient-ils encore les moyens ? Je veux dire, eux avaient été francisés : si même à la maison ils nous avaient parlé alsacien, aurait ce été une résurgence de mots, de phonèmes (une renaissance pour eux aussi), ou bien une pratique artificielle, convenue, sans chaire, comme un professeur ennuyeux devant un amphithéâtre dissipé ? C'est de ce découragement qu'ils sont coupables, mais ce ne sont pas les responsables de cette acculturation (qui eux ne sont plus attaquables). Alors contre qui se battre ?
Il n'y a "Personne" tel un cyclope à l'oeil crevé !
Voilà notre seule réponse possible. Et quelle pitié de voir ma grand-mère paternelle, bonne citoyenne française d'origine alsacienne, réduite à néant quand il s'agit de parler la langue officielle, elle si prolixe dans sa langue maternelle que c'en est un plaisir de l'écouter raconter des histoires ou jouter oralement avec une comère ...
Et ces alsaciens, descendants directs, ironie du sort, des peuplades franques primitives, mérovingiens à "l'origine" de leur France chérie, qui a pourtant asphyxié leur façon de parler le français ... Oui, "Personne" si ce n'est l'inertie de l'histoire, la force des choses ...
>> Et moi alsacien de 3 ans pour toujours, il ne me sera même pas offert cet élan de lyrisme : "Les Orties Noires" ou plutôt "Di Schwarzi Segenlse" de Claude VIGéE, long poème en prose jailli tardivement dans sa langue maternelle "oubliée".
>> Et moi, élevé par une nourrice alsacienne germanophone jusqu'à l'âge de 3 ans, c'est à dire l'âge des premiers souvenirs. Autant dire élevé à parité entre l'allemand et le français avant que mes souvenirs ne se forment. Mais suffisamment imprégné de cette autre langue, que je ne comprendrai désormais plus dans la bouche de mes propres grands parents, avant un timide réveil au cours tardif de mon adolescence. Les alsaciens germanophones pour qui je resterai toujours un "chien savant" francophone ; j'aurai toujours trois ans pour mes grands parents paternels !
Si pour la génération de mes parents il était encore aisé de se rebeller contre le pouvoir qui leur avait explicitement interdit leur langue maternelle, retranché cette extension de l'organe qu'est "une voix qui dit sa langue", pour nous que reste-t-il à combattre ?
Nos parents, déjà artificialisés par le français, pouvaient nous transmettre cette langue, mais en avaient-ils encore les moyens ? Je veux dire, eux avaient été francisés : si même à la maison ils nous avaient parlé alsacien, aurait ce été une résurgence de mots, de phonèmes (une renaissance pour eux aussi), ou bien une pratique artificielle, convenue, sans chaire, comme un professeur ennuyeux devant un amphithéâtre dissipé ? C'est de ce découragement qu'ils sont coupables, mais ce ne sont pas les responsables de cette acculturation (qui eux ne sont plus attaquables). Alors contre qui se battre ?
Il n'y a "Personne" tel un cyclope à l'oeil crevé !
Voilà notre seule réponse possible. Et quelle pitié de voir ma grand-mère paternelle, bonne citoyenne française d'origine alsacienne, réduite à néant quand il s'agit de parler la langue officielle, elle si prolixe dans sa langue maternelle que c'en est un plaisir de l'écouter raconter des histoires ou jouter oralement avec une comère ...
Et ces alsaciens, descendants directs, ironie du sort, des peuplades franques primitives, mérovingiens à "l'origine" de leur France chérie, qui a pourtant asphyxié leur façon de parler le français ... Oui, "Personne" si ce n'est l'inertie de l'histoire, la force des choses ...
>> Et moi alsacien de 3 ans pour toujours, il ne me sera même pas offert cet élan de lyrisme : "Les Orties Noires" ou plutôt "Di Schwarzi Segenlse" de Claude VIGéE, long poème en prose jailli tardivement dans sa langue maternelle "oubliée".
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